Le droit de propriété est divisé en plusieurs prérogatives :
Ex : vous achetez un appartement dans lequel vous avez décidé d’y habiter. Vous l’utilisez.
Ex : vous décidez de louer votre appartement. Les loyers seront les fruits que vous percevrez.
Ex : vous décidez de vendre votre appartement. C’est un acte important qui vous permet d’abuser de l’usage normal du bien.
Lorsqu’une personne est propriétaire d’un bien, elle en a la pleine propriété. C’est-à-dire qu’elle dispose des 3 prérogatives du droit de propriété.
Si un propriétaire dispose de 3 prérogatives, il peut en céder ou donner certaines d’entre elles. C’est ce qu’on appelle le démembrement de propriété. Par l’éclatement de cette pleine propriété, plusieurs personnes auront des droits sur un même bien. On parle alors de nu-propriétaire (abusus) et d’usufruitier (fructus). L’usus étant ainsi à la fois partagé entre ces personnes.
Lorsque cette notion de démembrement de propriété s’invite en droit des sociétés, elle met en concours entre usufruitier et nu propriétaire, des droits et obligations qu’ils doivent se partager sur des droits sociaux (parts sociales ou actions) qu’ils se partagent.
Dès lors que des personnes différentes ont vocation à exercer des droits sur des mêmes parts sociales ou actions, un questionnement s’impose : qui de l’usufruitier ou du nu-propriétaire est considéré comme l’associé ?
De ce questionnement découle d’autres interrogations : lequel doit être convoqué aux assemblées générales ? qui participe et qui peut voter ? De manière plus générale, qui détient les prérogatives attribuées aux associés ?
C’est un questionnement qui avait posé de nombreux problèmes, la jurisprudence ayant donné de nombreux éléments de réponse, et dont le législateur métropolitain les as repris en modifiant son Code civil.
Nous tenterons de vous expliquer les potentielles différences entre la loi française et calédonienne.
La Loi pose un principe général aux articles 1844 alinéas 3 et 4 du Code civil métropolitain et calédonien, selon lesquels le droit de vote est réparti entre nu-propriétaire et usufruitier :
Code civil métropolitain :
Alinéa 3 : « Si une part est grevée d’un usufruit, le nu-propriétaire et l’usufruitier ont le droit de participer aux décisions collectives. Le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier. Toutefois, pour les autres décisions, le nu-propriétaire et l’usufruitier peuvent convenir que le droit de vote sera exercé par l’usufruitier. »
Alinéa 4 : « Les statuts peuvent déroger aux dispositions du deuxième alinéa et de la seconde phrase du troisième alinéa. ».
Code civil calédonien :
Alinéa 3 : « Si une part est grevée d’un usufruit, le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier. »
Alinéa 4 : « Les statuts peuvent déroger aux dispositions des deux alinéas qui précèdent. ».
Il n’existe pas d’autre disposition dans le Code civil. On notera plus de flexibilité dans le Code civil métropolitain en ce qu’il permet que la détermination du droit de vote se fasse au choix, soit dans les statuts (donc imposé au nu-propriétaire et usufruitier), soit par une convention entre eux qui s’imposera à la société.
En droit calédonien, seuls les statuts le permettent et aucune convention ne peut être imposée à la société.
Une fois le droit commun ou droit général étudié (le Code civil), il convient de vérifier si des dispositions spéciales peuvent aménager cette répartition du droit de vote.
Le droit spécial devant s’appliquer prioritairement au droit général.
En matière de sociétés anonymes, il est prévu à l’article L.225-110 du Code de commerce (droit spécial), tant métropolitain que calédonien, que : « Le droit de vote attaché à l’action appartient à l’usufruitier dans les assemblées générales ordinaires et au nu-propriétaire dans les assemblées générales extraordinaires », avec toujours la possibilité d’y déroger par les statuts de la société (alinéa 4).
A ce stade, on notera simplement d’une part, que le droit spécial prévoit que le droit de vote de l’usufruitier n’est pas lié à une prérogative financière (l’affectation des bénéfices) comme l’énonce l’article 1844 du Code civil ; d’autre part, que si chacun dispose du droit de vote, ils doivent être convoqués tous les deux.
Aux vues de ces textes et du fait que l’usufruitier comme le nu-propriétaire peuvent participer aux assemblées générales (et être convoqués) et voter de nombreuses décisions, il serait envisageable de considérer l’usufruitier pleinement comme un associé.
Dans la réalité, il en est autrement. La Cour de cassation y a toujours répondu par la négative (A) même si la reconnaissance des prérogatives de l’usufruitier se sont accrues (B).
1.L’usufruitier n’a pas la qualité d’associé
A l’occasion d’une demande d’avis sollicité auprès la Chambre commerciale de la Cour de cassation sur la qualité d’associé de l’usufruitier, celle-ci y a répondu par la négative (Cass. com. 1 décembre 2021, 20-15.164).
La Chambre commerciale a affirmé très clairement pour la première fois que l’usufruitier n’a pas la qualité d’associé même s’il en a toutes les prérogatives.
Cet avis semble logique puisqu’elle avait déjà affirmé que le nu-propriétaire était l’associé (Cass. com. 4 janvier 1994 n° 91-20.256). L’apport de cet avis est qu’il s’agit de la première fois que cette qualité est clairement déniée à l’usufruitier.
Cet avis s’inscrit également dans la continuité et la volonté des Chambres de la Cour de cassation de s’aligner sur la qualification de l’associé usufruitier. Les Chambres civiles ayant déjà largement prit position sur cette qualification de non-associé depuis quelques années.
A l’appui de son raisonnement et à juste titre, la Chambre commerciale a rappelé l’article 578 du Code civil selon lequel : « L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre à la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance ».
Pour ne citer que lui, le Professeur d’universités Alain VIANDIER, en avait déjà prévu les contours dès 1978 en ce qu’il expliquait que deux éléments étaient nécessaires pour qualifier un associé : l’apport qu’il fait dans le capital social et son intervention dans la vie de la société. Il rajoutait également que « le nu-propriétaire ne cesse pas d’être apporteur du fait de la constitution de l’usufruit […] aussi garde-t-il (seul) la propriété des actions ou parts sociales… ». En conséquence, l’une des caractéristiques principales nécessaire à la qualification d’un associé serait sa qualité d’apporteur rémunéré par des titres sociaux.
C’est un raisonnement reprit par l’article 1832-2 du Code civil « la qualité d’associé est reconnue à celui des époux qui fait l’apport… » mais que nous ne partageons pas forcément puisque l’apporteur peut être l’usufruitier. Par exemple, lorsqu’une personne est associée en pleine propriété, elle a fait un apport en capital lui permettant de devenir associée. Au cours de sa vie, elle peut décider de faire une donation en nue-propriété de ses parts sociales et se conserver l’usufruit jusqu’à son décès. La qualité d’apporteur est donc bien celle de l’usufruitier.Notre vision est partagée par une partie de la doctrine puisque l’usufruitier peut ne pas avoir la qualité d’apporteur comme on l’a vu, laquelle explique que l’usufruit ne doit pas être considéré comme une prérogative mais comme un partage du droit de propriété.
2. La reconnaissance d’être un « quasi-associé »
Dans tous les cas, l’usufruitier reste titulaire des prérogatives inhérentes à chaque associé afin d’exercer son droit de jouissance à charge pour lui « d’en conserver la substance ».
Comme on l’a vu, ces prérogatives ne sont plus uniquement d’ordre financière. L’usufruitier pouvant disposer du droit de vote en dehors de l’affectation du résultat et des bénéfices. Et inversement pour le nu-propriétaire, qui serait à même de disposer du droit de vote lors de l’affectation du résultat.
Cette rédaction de l’article 1844 du Code civil est à notre avis contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation, laquelle interdit de priver l’associé usufruitier du droit de voter les décisions concernant les bénéfices.
Ainsi toute clause statutaire contraire serait nulle, par application de l’article 1844 alinéa 3 du Code civil, et contreviendrait à l’article 578 du même code qui attache à l’usufruit le droit d’user de la chose et d’en percevoir les fruits (Cass. com., 31 mars 2004, 03-16.694).En plus de cette prérogative de voter, a-t-on reconnu à l’usufruitier d’autres prérogatives attribuées aux associés ?
L’avis rendu par la Chambre commerciale du 1er décembre 2021 explique qu’en vertu de l’article 39 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 : « un associé non-gérant peut provoquer toute délibération des associés sur une question déterminée », ce qui permettrait à l’usufruitier, considéré comme non associé, de provoquer une assemblée générale.
C’est un raisonnement reprit l’année suivante par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 16 févr. 2022, n° 20-15.164 : « L’usufruitier de parts sociales ou d’actions ne peut se voir reconnaître la qualité d’associé mais est en mesure de provoquer une délibération des associés si celle-ci est susceptible d’avoir une incidence directe sur son droit de jouissance des parts sociales. »)
La Haute Juridiction a précisé la notion de « question déterminée » qui doit s’entendre comme toute délibération « susceptible d’avoir une incidence directe sur son droit de jouissance ».
Il s’agit d’une précision importante en ce que jusqu’alors ce droit appartenait au nu-propriétaire peu importe l’objet de la délibération.
Ainsi on reconnait à l’usufruitier des prérogatives attribuées à un associé plein propriétaire ou à un associé nu-propriétaire.
Comme conséquences de toutes ces précisions jurisprudentielles, on pourrait presque prétendre désormais à qualifier désormais l’associé usufruitier de « quasi-associé ». Lequel doit être convoqué aux assemblées générales et peut y voter.
Le cabinet LEGISCAL se tient à votre disposition pour de plus amples informations, via la page de contact.
L’assemblée générale est un mode de consultation collectif où l’ensemble des associés ou actionnaires, selon la forme sociale, sont convoqués afin de statuer sur une ou plusieurs décisions qui leur sont soumises.
Selon la qualification des décisions à prendre, les règles de quorum et de majorité varient. Ainsi on distinguera les assemblées générales « ordinaires », où les règles de quorum et de majorité sont plus basses, des assemblées générales « extraordinaires » concernant les décisions les plus importantes. Nous reviendrons sur ces différentes assemblées lors d’une prochaine newsletter.
Pour information, d’autres modes de consultation peuvent être mis en œuvre : la consultation écrite et l’acte unanime, que nous étudierons dans une prochaine newsletter également.
Il est à noter toutefois que l’approbation des comptes annuels doit obligatoirement se tenir en assemblée générale. D’autres décisions peuvent également l’être, nous les évoquerons ci-après.
Pour ce faire, nous étudierons le régime juridique des assemblées générales selon la forme juridique de la société : SARL, SAS, SA, ou SCI.
Nous étudierons les cas lorsque la convocation d’une assemblée générale est obligatoire et nous bornerons notre étude aux formes sociales les plus courantes.
Pour les SARL, les décisions sont par principe prises en assemblée (L.223-27 C.com). Si les statuts le prévoient, elles peuvent être prises sous d’autres formes : soit par consultation écrite des associés, soit résulter du consentement de tous les associés exprimés dans un acte (acte unanime).
Toutefois la tenue d’une assemblée générale reste impérative, à l’exclusion de toute autre, dans 6 cas :
Toute clause contraire est réputée non écrite.
Qui convoque ?
Plusieurs personnes peuvent être à l’origine de la convocation :
En principe, il appartient au gérant (représentant légal), ou à défaut le Commissaire aux comptes s’il y en existe un, de convoquer les associés (L.223-27 C.com).
Ils doivent également procéder aux convocations lorsqu’elles sont demandées par des associés détenant les conditions vues ci-dessus.
Toutefois peuvent également procéder à la convocation de l’assemblée générale :
Par quel mode de convocation et sous quel délai ?
La convocation doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception au moins 15 jours avant la tenue de l’assemblée générale. Ce délai peut être réduit à 8 jours, en cas de remplacement de l’unique gérant décédé (R.223-20 C.com).
Ce délai de 15 jours est un minimum, les statuts peuvent exiger un délai plus long.
Le calcul du délai minimal de 15 jours entre la convocation et la tenue de l’assemblée générale doit être apprécié selon les modalités fixées par les statuts, tout en respectant les dispositions du Code de procédure civile (articles 640 à 642) : le délai court à compter du lendemain de l’envoi de la lettre et le jour de l’assemblée générale est compté.
Ex : La LRAR est envoyée le 1er février, le délai de 15 jours court à compter du 2 février. L’assemblée générale ne peut se tenir qu’à compter du 16 février.
Pour les SAS, ce sont les statuts qui déterminent librement les modes de décisions : soit par décision du Président (représentant légal), soit par décision des actionnaires, soit encore par tout autre organe social habilité. Certaines décisions peuvent être réservées à un seul organe et d’autres exercées conjointement. Dans ce dernier cas, on parlera de validation a posteriori. Par exemple, ce peut être le cas lorsque le Président est habilité à transférer le siège social de la société sous réserve de ratification par la plus prochaine assemblée générale.
Toutefois la tenue d’une assemblée générale reste impérative, à l’exclusion de toute autre, dans 3 cas :
Le régime juridique des SAS étant peu fourni et soumis à la liberté statutaire, toutes les autres décisions seront régies par les dispositions statutaires. Si les statuts n’ont pas prévu un mode de décision, la liberté de mettre en place un nouveau mode de consultation est possible.
Qui convoque ?
Lorsque les statuts n’ont pas prévu l’organe compétent chargé de convoquer l’assemblée générale, un actionnaire peut convoquer ou procéder à la désignation judiciaire d’un mandataire ad hoc, notamment en cas de carence de l’organe compétent.
Par quel mode de convocation et sous quel délai ?
La liberté statutaire permet de fixer librement les modes et le délai de convocation. Toutefois il ne faut pas porter atteinte au droit des actionnaires de pouvoir s’organiser pour y participer et de leurs laisser le temps de pouvoir analyser les convocations qui leurs sont soumises.
Pour les SA, les décisions sont de fait prises en assemblée puisque les décisions ne peuvent résulter ni d’une consultation écrite, ni du consentement unanime des actions exprimé dans un acte (acte unanime).
En revanche, le vote par correspondance est possible (L.225-107 C.com).
Qui convoque ?
L’assemblée générale peut être convoquée par plusieurs organes mais selon un ordre précis (L.225-103 C.com) :
Il convient de préciser que le Conseil d’administration ou le Directoire, selon le mode de gouvernance choisi, est prioritaire pour convoquer.
A défaut ou en cas de défaillance de ce dernier, c’est aux organes suivants énumérés ci-dessus qui détiennent la possibilité de convoquer.
Par quel mode de convocation et sous quel délai ?
La convocation doit être faite par lettre simple, lettre recommandée avec accusé de réception ou par voie électronique (R.225-67 C.com) au moins 15 jours avant la tenue de l’assemblée générale sur première convocation et au moins 10 jours sur convocation suivante (R.225-69 C.com).
Ces délais sont un minimum, les statuts peuvent exiger un délai plus long.
Le calcul du délai de convocation doit être apprécié selon les modalités fixées par les statuts, tout en respectant les dispositions du Code de procédure civile (articles 640 à 642) comme expliqué ci-dessus pour les SARL.
Il est à noter que l’ensemble de ces règles concernent les SA les plus généralement connues. D’autres règles spécifiques peuvent s’appliquer en raison de la qualité des associés et lorsque la société est admise sur un marché réglementé (société cotée).
Les décisions sont par principe prises en assemblée (art. 1853 du C.civ.) ou par le consentement de tous les associés exprimé dans un acte (art 1854 C.civ). Toutefois, les statuts peuvent prévoir également qu’elles résulteront d’une consultation écrite.
Qui convoque ?
Les statuts établissent les modalités de fonctionnement de la société (art 1835 C.civ).
Par principe, les statuts prévoient que c’est au gérant de convoquer l’assemblée, ou à défaut de précisions statutaires :
Par quel mode de convocation et sous quel délai ?
Les convocations doivent être envoyées par lettre recommandée au moins 15 jours avant l’assemblée générale (Décret 78-704, article 40).
Le calcul du délai de convocation doit être apprécié selon les modalités fixées par les statuts, tout en respectant les dispositions du Code de procédure civile (articles 640 à 642) comme expliqué ci-dessus pour les SARL.
Pour toute question ou demande, contactez un juriste du cabinet LEGISCAL en complémentant le formulaire sur le site page de contact ou en envoyant un email à : secretariat@legiscal.com
La mise à pied à titre conservatoire est souvent confondue avec la mise à pied disciplinaire. Pour autant, l’une et l’autre sont très différentes en ce qu’elles n’ont pas le même objectif.
La mise à pied conservatoire est une mesure conservatoire, comme son nom l’indique, c’est-à-dire une mesure ayant pour objet la suspension du contrat de travail du salarié « suspecté » de manquements graves afin de préserver l’activité de l’entreprise.
Elle est prévue à l’article Lp. 132-5 du code du travail de Nouvelle Calédonie : « Lorsque les faits reprochés au salarié ont rendu indispensables une mesure conservatoire de mise à pied à effet immédiate, aucune sanction définitive relative à ces faits ne peut être prise sans que la procédure prévue à l’article Lp. 132-4 ait été observée. » (à savoir, la procédure disciplinaire).
En effet, dès qu’un fait grave est rapporté au sujet d’un salarié et qu’il s’avère vraisemblable, l’employeur a la possibilité de prononcer une mise à pied conservatoire à l’encontre du salarié concerné.
Cette mesure a pour but de protéger l’activité de l’entreprise, ou les autres salariés, ou encore le matériel de travail, mais aussi potentiellement le salarié concerné lui-même. En effet, bien qu’elle puisse paraitre comme vexatoire, la mise à pied à titre conservatoire permet aussi de protéger le salarié contre lequel de graves accusations ont été portées, peut être sans preuve.
La période de mise à pied conservatoire va permettre à l’employeur de diligenter une enquête interne et notamment de rechercher si les faits reprochés au salarié sont justifiés ou non.
C’est pendant cette période que les preuves des éventuels manquements du salarié vont être collectées.
Ainsi, il est fortement recommandé de prononcer la mise à pied conservatoire le jour même de l’engagement de la procédure disciplinaire à savoir, la notification de la lettre de convocation à entretien préalable.
La mise à pied conservatoire peut être prononcée de manière préalable verbalement : il sera alors précisé au salarié qu’il est dispensé de travailler jusqu’à ce qu’une décision soit prise à son encontre tout en lui précisant qu’il sera très prochainement convoqué à un entretien préalable afin qu’il puisse connaître les faits qui lui sont reprochés et s’exprimer.
Afin d’éviter toute difficulté par la suite, il est important de rappeler cette mise à pied conservatoire verbale dans la lettre de convocation à entretien préalable par une brève mention : « Nous vous confirmons la mise à pied conservatoire qui vous a été notifiée verbalement ce jour. »
Même si le salarié est coopératif, il est important de se ménager des moyens de preuve dès le début de la procédure disciplinaire.
A ce stade, il n’est pas encore possible de savoir si la mise à pied conservatoire sera rémunérée ou pas : tout dépend de la sanction qui sera décidée après l’entretien préalable.
Si les faits sont suffisamment graves pour justifier un licenciement pour faute grave ou lourde, la période de mise à pied conservatoire peut ne pas être rémunérée, mais ce n’est pas une obligation.
En effet, même si un licenciement pour faute grave est décidé, il est toujours possible de rémunérer la période de mise à pied conservatoire. Pour autant, nous vous conseillons de rester cohérent. Si la période de mise à pied conservatoire n’est pas rémunérée, une mention devra être faite dans la notification du licenciement pour faute grave, confirmant la situation.
Il est également possible de ne pas prononcer de sanction disciplinaire si les faits reprochés au salarié s’avèrent en réalité non fondés. Il est bien évident que dans ce cas, la période de mise à pied conservatoire sera rémunérée.
Comme vous l’avez compris, la mise à pied conservatoire n’est donc pas une sanction. Elle est un outil au service de l’employeur dans le cadre de la procédure disciplinaire.
La mise à pied disciplinaire, quant à elle, est une sanction qui ne peut être prononcée qu’après un entretien préalable.
Elle a une incidence sur la rémunération et la présence du salarié dans l’entreprise.
En effet, la mise à pied disciplinaire suspend le contrat de travail pendant une durée déterminée. Cette durée doit être mentionnée dans la lettre de notification de la sanction, ainsi que la date du début de mise à pied et la date de reprise du poste.
Une mise à pied disciplinaire ne pourra être prononcée que si le règlement intérieur de l’entreprise prévoit une telle sanction ainsi que sa durée maximale. Si ce préalable n’est pas rencontré, l’employeur ne pourra pas valablement sanctionner par une mise à pied.
Comme toute sanction disciplinaire, elle ne peut être prononcée moins d’1 jour franc ni plus d’un mois après la date de l’entretien préalable (article Lp. 132-4 du code du travail).
Le décompte en jour franc nécessite de ne pas tenir compte du jour de l’évènement, en l’espèce, la date de l’entretien préalable : un jour franc correspond au surlendemain. Par exemple, si l’entretien a lieu un mercredi, la sanction ne peut être prise qu’à partir du vendredi.
Pour mémoire, à moins que cela ne soit précisé dans le règlement intérieur ou dans un accord d’entreprise ou tout autre accord collectif, rien n’interdit l’employeur de prononcer une mise à pied disciplinaire à l’encontre d’un salarié qui n’a jamais fait l’objet de sanction moindre telle qu’un avertissement ou un blâme. Il suffit seulement que la mesure disciplinaire soit proportionnelle à la gravité de la faute.
Cette suspension emporte l’absence de toute rémunération pendant cette période, tant le salaire que ses accessoires (primes, etc.).
A défaut, cette sanction pourra être annulée par le juge emportant un rappel de salaire et de congés payés pour la période en question.
Le salarié ne doit pas se présenter au travail pendant la durée de l’exécution de la mesure disciplinaire. S’il ne respecte pas cette obligation, il peut encourir une nouvelle sanction disciplinaire plus grave. Et l’employeur devra de toutes les manières suivre la procédure légale (convocation à un entretien préalable, etc.).
Vous l’aurez compris, la mise à pied conservatoire et la mise à pied disciplinaire sont des décisions bien différentes qui poursuivent chacune des objectifs distincts.
Le cabinet LEGISCAL se tient à votre disposition pour de plus amples informations, via la page de contact.